Qui va acheter la rue de la Paix ?
Par Noura Mebtouche.
Le colloque sur l’Union européenne et ses rapports à la méditerrannée, qui s’est déroulé à l’ hôtel de région à Marseille ce samedi 29 septembre 2018, était révélateur, de par sa composition en deux parties, des doutes, des égarements mais aussi des hésitations qui assaillent les différents gouvernements autour de cette question difficile qu’est la place et l’avenir de l’Union pour la méditerrannée.
Ce colloque organisé par l'association Euromed IHEDN était un événement d’importance, de par le bilan qui a été fait de l’Union méditerranéenne et de son partenaire incontournable l'union européenne.
Peut être peut on voir dans ces égarements et ses hésitations exprimés, une forme de retenue devant quelque chose que l’on ne connait pas, sorte de réservoir sacré que l’on oserait plus toucher tant les guerres y ont été nombreuses, et fratricides.
C’est dans le cadre de cet ensemble géopolitique que se sont jouées les deux premières guerres mondiales Auguste contre Cleopâtre et Marc-Antoine, puis Carthage ont pour théâtre les enjeux d’aujourd’hui peut être davantage une forme ostracisme de la part de certains dirigeants du nord.
En effet les occasions manquées de rendre plus institutionnel et donc l’objet d’une régulation par les Etats, du nombre incalculable de choses qui s’y font déjà via les associations mais également les collectivités territoriales sont nombreuses.
Le plan des interventions en deux parties témoigne de ces hésitations encore nombreuses quant à l’articulation nécessaire entre dimension européenne et dimension méditerranéenne :
1. Les obstacles que rencontre l’union européenne pour mener ses projets de partenariat en méditerrannée.
2. Quelles ambitions pour un partenariat avec l’union Européenne en Méditerrannée ?
Si on en est encore à s’interroger sur ces points qui sont évidents nous ne tarderons pas à avoir une nous faire supplanter par d’autres, chinois, américains ou encore russes.
Faire de la future Union méditerranéenne une entité aussi importante que l’Union européenne serait une belle occasion d’avoir une gouvernance équilibrée, en maintenant intacte notre vision du globe avec la méditerrannée au centre alors même que les chinois qui ont bien compris que le temps des guerres ayant pour objet cet enjeu crucial était terminé et qu’il fallait laisser se superposer les cartes géographiques , eux même ayant en vue un autre découpage avec eux au centre.
Les africains du nord au sud ont le leur, eux aussi s’estiment être au centre.
C’est en privilégiant cette ouverture d’esprit que nous pourrons rester en phase avec notre histoire.
la méditerrannée comme berceau de l’Europe.
Nul part lors de cette intervention, il n’a été cependant question de la Grèce, qui est pourtant un point important de notre ancrage européen lors de ce colloque.
Les hésitations, on le comprend : le sujet reste tabou lorsqu’il s’agit de confronter une Union européenne et une Union méditerranéenne à construire.
La encore, la Chine, après l’occasion ratée lors du Grexit, manque de laisser la Russie s’emparer du projet de gouvernance eurasiatique.
Laissons faire les chinois, le projet routes de la soie est créateur d’emplois nouveaux biens utile pour aider la Grèce à se relever et pour absorber le flots des réfugiés dans toute l’Europe, mais nous devons être vigilants et ne pas rater l’opportunité d’y être présents. (voir également notre article sur Chypre).
Par exemple, en matière de défense : ceux qui pensent qu’il faut une défense proprement européenne ont tort : cette dernière ne saurait être efficiente en se coupant des opportunités venues du reste du monde a fortiori l’Afrique du Nord et le Moyen Orient.
Ainsi, le livre blanc de François Hollande ne tient pas suffisamment compte de la présences pays du Sud en tant que partenaires pour la Paix.Il n’intègre pas cette composante méditerranéenne autrement que dans une perspective colonialiste.
Dans la préparation de la défense française alors même que nous nagions en pleine crise islamiste double Dun début de crise des réfugiés, h invitait tous ses homologues a participer aux débats autour du livre blanc, tout spécialement les pays du nord, mais aucun du versant sud de la Méditerranée ni du moyen orient.
Il n’est pas étonnant des lors, que devant un tel aveuglement qui témoigne peut être d’une vision découpée de la géopolitique mondiale visant à désolidariser les territoires en blocs opposés par la guerre, le choix de la présidence suivante de ne pas rédiger de livre blanc tout de suite, mais uniquement un indicateur des stratégies et objectifs a venir était judicieux.
Le livre blanc comporte outre un catalogue des moyens mis en oeuvre et à disposition, des considérations stratégiques sur les objectifs à mener et les moyens politiques et militaires utilisés dans la conduite de notre défense mais aussi de coopération avec le reste du monde, pour la paix dans le monde.
On comprend très bien que dans le contexte actuel ou les cartes sont brouillées on puisse éprouver le besoin attendre un peu avant de mettre au point un nouveau livre blanc.
Celui là sera en effet, déterminant pour les choix futurs, et marquant dans la définition de notre ligne de défense pour des décennies, il couvrira notamment, outre la question nucléaire, (qui elle aussi mérite d’être éclaircie), la question de nos rapports avec l’essentiel des Etats qui nous sont voisins du sud de la meditterrannée jusqu’au nord est, les pays de l’est ayant une importance capitale pour avenir de l’Europe. Les enjeux qui se jouent au Caucase, le sceptre d’une nouvelle balkanisation, l nécessité d’une coopération, et le maintien dans ces régions mouvementées d’une culture européenne sont importants.
Enfin, nos rapports et notre coopération nécessaires avec la Chine et l’Union eurasiatique (nous devons aussi en faire partie) méritent d’être anticipés, et nous devons réfléchir à l’ impact des changements que cela va apporter. (Souvenons nous des Balkans).
Mais, et c’est bien là ce que l’on peut retenir de ce colloque, nous devons réfléchir à la manière dont les différentes influences peuvent se complémentariser dans une optique de Paix dans le monde et non pas seulement de règlement des conflits actuels.
C’est à dire que nous devons réfléchir à long terme.
Actuellement, les différents pays partie prenante aux différents ensembles qui se proposent comme outils : politique de voisinage, dialogue 5+5, UPM, coopération bilatérale, ne semblent pas encore prendre la juste mesure des enjeux.
Ces lacunes en matière de réflexion sur une nouvelle gouvernance mondiale pour la Paix représentent un véritable gouffre dans lequel se retrouvent toutes les parties prenantes à un équilibre des territoires et à une prise en compte de la diversité des peuples et des cultures, dont on doit tenir compte pour la paix dans le monde.
Il manque une véritable plate-forme en dehors de l’organisation des Nations Unies qui elle, est créatrice de droit pour organiser la paix dans le monde dans une optique de long terme.
L’idée d’une organisation des Etats indépendants et autonomes pourrait y remédier.
La question est aussi de savoir qui de Barcelone ou de Marseille, draînant avec elle Montpellier et Nice, en raisonnant à une échelle correcte pour une dimension méditerranéenne, sera la ville déterminante et locomotive pour cette dernière.
Il se pourrait, étant donné les enjeux qui sont mis en avant par le concept de non alignement, que ce soit à la France de mener le jeu.
Laisser ce rôle uniquement à l’Espagne serait trop réducteur et serait négliger et passer à côté de l’immense chance que nous avons, nous français d’avoir eu dans le passé des relations privilégiées avec les pays d’Afrique du Nord, notamment l’Algérie.
Peut être ne se rendait on pas alors compte juste avant la crise des subprimes et les réfugiés de importance de enjeu à la fois pour la paix mais aussi pour notre place en tant que puissance dans le monde lorsque l’UPM fut crée.
Très certainement aveuglés par les chimères qui comme pour Ulysse, égarent l’aventurier dans des lieux improbables tel que l’a fait l’Europe, les dirigeants de l’époque ont ils pris la chose comme une bonne idée certes mais sans en mesurer importance et le caractère urgent d celle-ci, comme à reporter aux calendes.
Peut être si nous avions pris plutôt la mesure de l’importance de la chose publique et de sa version méditerranéenne, n’aurions nous pas eu à affronter une crise des réfugiés aussi dramatique, ni n’aurions eu à subir certaines attaques terroristes.
Peut être même, cela aurait-il permis d’éviter la guerre en Syrie, par extension.
Pourtant, les mots éthique que l’on relie au politique et à l’économique et qui viennent de Grèce sont déjà présents dans l’air du temps des relations internationales avec l’émergence de notions comme la bonne gouvernance ou encore les objectifs millénaires du développement devenus aujourd’hui objectifs du développement durable.
Le mot clé est ici est gouvernance, l’un des intervenants, Akram Belkaid le rappelait lui même.
Des solutions ressortaient de ce colloque montrant l’idée de la fin d’un monde coupé en deux…la fissure…
Trois items :
- Economique : réduire la fracture liée au différentiel de revenu de 1 pour 10.
-Politique : des objectifs communs, des retours sur histoire accompagnés de réconciliations.
-Éthique respect dune éthique mondialisée avec les ODD, et le respect des textes du droit international (charte de l’ Onu et déclaration universelle de 1948 pour ne citer qu’eux).
Trois voeux positifs :
-Sortir de la crise Eco mondiale,
-Fin de la tension islamiste,
- Implications des Etats européens en coopération.
Trois solutions :
-passer de l’aide au développementt au co-développement.
-tenir compte du triangle des trois mers (mer de Chine, mer Baltique, Mer méditerrannée) et y être présents. (d’où les enjeux du Pacifique).
-coopération pour la création d’emplois durables dans le cadre des routes de la soie.
Cependant, se contenter de mener à bien ces objectifs là seulement ne serait pas suffisant.
Dans beaucoup d’Etats troublés en Afrique ou au Moyen-Orient, la solution passe par le maintien de certaines dictatures qui peuvent devenir éclairées (et qu’on peut aider à l’être) pour éviter le chaos.
Sur le plan des rapports entre la France et l’Algérie, de premiers ponts diplomatiques ont été lancés qui pourraient laisser la place à une future réconciliation..
Nous devons être capable de lire les différentes cartes correctement en pratiquant le relativisme culturel, les ethnocentrismes ne sont plus de mise.
La carte qui relie l’Afrique à l’Europe se voit comme une colonne qui monterait vers le nord ce fameux Choeur qui a inspiré à le Corbusier son choeur sur deux étages dans l’Eglise Saint-Pierre à Firminy en référence à Theilard de Chardin.
En effet, relativisme culturel ne signifie pas abandon des cultures européennes.
Comme cela a été dit, le fond du problème reste encore et toujours celui de la gouvernance.
Mais quelle gouvernance ?
A quel niveau d’abord ?
S’agira t’il de laisser d’abord et avant tout agir les collectivités territoriales, et bientôt les métropoles qui ont des compétences en matière diplomatique ?
L’enjeu est important et relève d’abord des compétences régaliennes des Etats, à commencer par la défense mais aussi la coopération multilatérale.
Dans un tel contexte il est important de raviver la politique de voisinage dans sa dimension méridionale, rendre plus parent et plus médiatisé le dialogue 5+5, et faire de cette plate forme autre chose qu’un simple lieu de débat.
Il faut aussi résoudre le problème du choix entre l’Espagne et la France comme centre de gouvernance.
De par sa position centrale son héritage grec, Marseille serait la ville toute trouvée pour cela métropolisation aidant, cela aiderait sur le plan de l’aménagement du territoire à mettre en place ce rééquilibrage tant souhaité entre la ville centrale du Nord Paris, et la ville centrale du sud, Marseille, c’était le but ailleurs de la décentralisation tant souhaitée et menée par Gaston Defferre.
Etant donne la position privilégié de la France,
Il faut d’abord résoudre certaines rancoeurs. On peut se demander si le choix de Barcelone n’est pas le reflet devant les non revendications marseillaises, à l’époque de sa création, d’une ignorance volontaire des problématiques qui continent a diviser la France et l’Algerie.
Résoudre ce problème dans une optique de coopération et d’entente, de réconciliation serait ainsi le point crucial d’un maintien de la France parmi les puissances qui comptent sur un plan géopolitique mondial.
Chose qu’elle ne saurait maintenir à long terme, en se confrontant uniquement aux grandes puissances économiques situées au Nord ou sur son flanc est.
Sans aller jusque a une défense européenne trop privatrice des souverainetés des Etats en matière militaire, nous devrions néanmoins mettre en place des moyens de mutualisation sur le plan nucléaire et créer une vraie coopération.
Il faut garder les accords bilatéraux comme France-Royaume uni, et laisser chacun garder sa souveraineté sans occulter ce qui se fait en commun c’est a dire bien en définir les points.
Ce serait renouer avec la CED des années 50 sans reprendre le plan Monnet dans toute son ampleur, pour éviter de se retrouver sous l’égide de l’Otan dans une défense européenne qui serait atlantique.
Par ailleurs il faudrait multiplier les initiatives au sein de l’OSCE, seule entité supranationale suffisamment étendue en nombre de pays membres pour espérer obtenir des accords de paix à long terme au dessus des intérêts des pays ou des groupes de pays.
L’enjeu Chypriote est important : le nord reste turc avec ses enjeux aux frontières qui sont cruciaux (voir problématiques kurdes), les troubles liés a la Russie persistent.
Le sud est européen depuis 2004, même sil ne fait pas partie des accords de Schengen. L’ensemble géographique est situé a proximité des Balkans une autre zone européenne qui a toujours été turbulente.
Noura Mebtouche.
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