Et si la City rebondissait grâce à la " banque de l'ombre " ?
Le Mondevendredi 1 décembre 2017
Le rapatriement de l'Autorité bancaire européenne de Londres vers Paris, dommage -collatéral du Brexit pour les Britanniques, n'est pas qu'une bonne nouvelle. Certes, il est mis fin à cette situation cocasse où l'un des berceaux de la régulation et de la supervision bancaires, première pierre de l'union bancaire, ne se situait pas dans la zone euro.
Les tories antieuropéens, et pas seulement ceux qui allaient jusqu'à dire oui au Brexit, expliquaient depuis le Financial Services Act de 2012 que la régulation bancaire devait être cohérente avec la politique monétaire : chacun devait régner sur ses banques, et celles de la City devaient composer avec la livre sterling, sous la supervision de la Banque d'Angleterre. En adoptant cette vision nationaliste de la stabilité financière, symbolisée par la reprise en main des banques par la Banque d'Angleterre et la disparition de la Financial Services Authority en 2013, cette position était annonciatrice du Brexit.
Tout comme il n'a jamais accepté de payer pour les agriculteurs européens, le Royaume-Uni refusait d'envisager de payer dans le cadre d'une solidarité bancaire au sein de l'Union. D'ailleurs, à quoi bon garder la livre sterling s'il fallait sauver la zone euro de la faiblesse de son système bancaire ? Le choix était clair : chacun doit faire la police bancaire sur sa place financière.
De plus, l'enjeu était de garder la City indépendante et attrayante, donc moins régulée sur certains sujets où les Anglais considèrent de haut leur supériorité, comme la libéralisation des rémunérations. La contestation du plafonnement des bonus par le gouvernement de James Cameron devant la Cour de justice de l'Union européenne en est l'illustration.
Le divorce avec l'union bancaire a été consommé bien avant le Brexit. En refusant la transposition de la directive de 2013 sur les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d'inves-tissement (dite " CRD IV "), Londres a signifié son attachement à une autorégulation qui passe par une intrusion minimale dans les forces du marché, en particulier les rémunérations des banquiers.
Certes, l'union bancaire semble désormais être facilitée par le retrait -britannique. L'Autorité bancaire européenne basée à Paris aura les coudées franches pour avancer vers une harmonisation sans exceptions. Pour continuer à bénéficier du passeport européen en donnant des gages de transparence, de nombreuses acti-vités financières vont suivre le même chemin que le régulateur européen et s'installer à Paris, ou ailleurs en -Europe continentale.Victoire à la Pyrrhus
Mais la finance ne va pas pour autant disparaître à Londres, et la City fera de la résistance. Or, la nature de cette résistance pourrait bien transformer ce symbole du déménagement de l'Autorité bancaire européenne en victoire à la Pyrrhus. En déconnectant totalement la Grande-Bretagne des questions de stabilité financière en Europe, le risque est en effet de créer une place financière spécifique, où la régulation sera moins forte.
Au cur du sujet se situeront bien sûr les rémunérations et la fiscalité, mais aussi la réglementation des nouvelles activités développées par les fintech,sujet sur lequel l'Autorité bancaire européenne a déjà commencé à phosphorer. La City, pour ne pas -perdre ses parts de marché, sera ac-commodante, afin de se positionner comme la place la plus avantageuse pour faire de l'argent.
Certes, s'agissant des banques régulées, le coût des sauvetages de 2008, qui ont représenté près de 10 % du PIB britannique, devrait calmer les -ardeurs d'une dérégulation trop visible. Mais c'est sans doute sur les nouvelles activités de la finance non régulée, qui se développent à grande vitesse, que la City va tenter de rebondir.
Elle ne cherchera pas uniquement à retenir les banques régulées en leur proposant une régulation plus souple ; elle va se positionner comme le royaume du shadow banking (" banque de l'ombre "). Il y a donc fort à parier que la City développe une finance nouvelle, qui entrera en concurrence frontale avec les banques régulées, repliées sur le continent européen et respectueuses d'une réglementation prudentielle vertueuse.
Le risque de ce positionnement hyper-libéral est celui d'une " islandisation " de la City. L'Islande, avant la crise financière de 2008, a connu un développement bancaire exponentiel… qui a très mal tourné. Basé sur la permissivité d'une spéculation débridée, qui a gonflé le bilan des banques de ce petit pays en quelques années, ce système a explosé car il était plus que vulnérable à la contraction des marchés de liquidités au moment de la crise des subprimes.
L'explosion des banques islandaises n'a eu que des conséquences somme toute marginales après 2008. Mais imaginons que la fièvre d'une place de la taille de la City, même amoindrie par le Brexit, conduise à ce qu'a connu l'Islande à l'époque ? Union bancaire ou pas, la crise sera mondiale. Si la City développe sa riposte aux effets collatéraux du Brexit sur son industrie de la finance en allant vers la facilité réglementaire – ce qui semble se profiler –, le risque systémique en Europe ne -reculera pas. Au contraire.
La révolution autour des nouvelles activités dérégulées de la " banque de l'ombre " est un enjeu majeur pour le système financier mondial. Sur ce terrain vont se jouer la survie de la City et la concurrence avec la finance européenne continentale. La participation britannique au comité de Bâle, qui regroupe les représentants des banques centrales et des autorités prudentielles de près de trente pays, ne sera pas suffisante : il faut maintenir la coo-pération avec Londres en matière de -supervision bancaire européenne.
par Frédéric Peltier
Aujourd’hui, le principal rôle de la BRI est de favoriser la coopération monétaire et financière internationale et d’agir en tant que banque des banques centrales. Pour remplir cette mission, elle dispose de moyens financiers propres et d’une organisation spécifique.
C’est en 1988 que naissent les premiers accords de Bâle, communément appelés « Bâle I ». Son dispositif principal (ratio de Bâle I, dit ratio « Cooke » du nom du premier Président du Comité de Bâle) oblige les banques actives à l’international à détenir un minimum de fonds propres au regard du montant de leurs engagements, l’objectif étant de réduire le risque systémique.
Face à la complexification des produits financiers dans les années 1990, les membres du Comité de Bâle ont été amenés à redéfinir, enrichir et améliorer les normes de régulation. Ces initiatives ont débouché sur la signature d’un deuxième accord, appelé « Bâle II », en 2004 puis, avant même la mise en œuvre complète des accords de Bâle II, d’un troisième (les accords de Bâle III) en novembre 2010 en raison du déclenchement de la crise financière de 2007/2008.
Au 31 mars 2015, le total des dépôts de la clientèle s’élevait à quelques 187 milliards de DTS, dont 95 % libellés en devises et 5 % en or.
Dotée d’un budget total de l’ordre de 297 millions de Francs Suisses en 2014/2015, et employant 623 personnes provenant de 57 pays, la BRI dispose d’une structure de gouvernance duale, avec un conseil d’administration qui détermine les grandes orientations stratégiques ou politiques, et un directeur général qui a en charge la gestion de l’institution.
C’est l’actuel président de la Bundesbank, l’Allemand Jens Weidmann qui occupe ces fonctions qui auparavant étaient exercées par Christian Noyer, lorsqu’il était gouverneur de la Banque de France. Son mandat court jusqu’en novembre 2018. L’Indien Raghuram Rajan le seconde en tant que Vice-président.
Une spécificité des statuts de la BRI fait que les gouverneurs des banques centrales de France, d’Allemagne, de Belgique, d’Italie, du Royaume-Uni et des Etats-Unis sont membres de droit du conseil d’administration et ont la possibilité de désigner un nouveau membre du conseil de même nationalité que la leur. C’est ce qui explique que la France compte deux membres au conseil d’administration de la BRI, tout comme les Etats-Unis, le Royaume-Uni, la Belgique ou l’Italie, mais pas le Japon ni la Chine. A noter également que le Président du conseil des gouverneurs de la BCE est également membre du conseil d’administration de la BRI.
Ce dernier se réunit au moins six fois par an et bénéficie de l’assistance de 4 comités chargés de le conseiller.
Banque des règlements internationaux (BRI)
La BRI a été fondée le 17 mai 1930, ce qui en fait la plus ancienne
institution financière internationale. Elle avait à l’origine la mission
de gérer les modalités financières du plan prévoyant les réparations de
guerre dues par l’Allemagne en application du Traité de Versailles de
1919.
Le
siège de la BRI se situe à Bâle, en Suisse. Elle est actuellement
présidée par Jens Weidmann, le gouverneur de la Bundesbank, qui exerce
jusqu’en novembre 2018 un mandat de trois ans. Depuis avril 2009
l’ancien gouverneur de la Banque d’Espagne, Jaime Caruana, assume quant à
lui les fonctions de directeur général de l’institution.Aujourd’hui, le principal rôle de la BRI est de favoriser la coopération monétaire et financière internationale et d’agir en tant que banque des banques centrales. Pour remplir cette mission, elle dispose de moyens financiers propres et d’une organisation spécifique.
La BRI œuvre en faveur de la coopération monétaire et financière internationale
La BRI favorise la coopération internationale entre les autorités monétaires et les autorités de surveillance du secteur financier dans le cadre de réunions qu’elle organise à l’intention des responsables de ces instances ainsi que dans le cadre du processus de Bâle qui consiste pour la BRI à héberger des comités internationaux chargés d’élaborer des normes et d’œuvrer à la stabilité financière.Le comité de Bâle
Le comité le plus connu est le comité de régulation financière internationale dénommé « comité de Bâle pour le contrôle bancaire ». Créé en 1974, il a pour mission de renforcer la régulation des banques et de promouvoir et diffuser de meilleures pratiques bancaires. Son principal objectif est toutefois d’assurer la stabilité du système financier à l’échelle mondiale. À cet effet, il établit des normes internationales dans le domaine du contrôle prudentiel des banques et constitue une instance de coopération internationale sur ces questions.C’est en 1988 que naissent les premiers accords de Bâle, communément appelés « Bâle I ». Son dispositif principal (ratio de Bâle I, dit ratio « Cooke » du nom du premier Président du Comité de Bâle) oblige les banques actives à l’international à détenir un minimum de fonds propres au regard du montant de leurs engagements, l’objectif étant de réduire le risque systémique.
Face à la complexification des produits financiers dans les années 1990, les membres du Comité de Bâle ont été amenés à redéfinir, enrichir et améliorer les normes de régulation. Ces initiatives ont débouché sur la signature d’un deuxième accord, appelé « Bâle II », en 2004 puis, avant même la mise en œuvre complète des accords de Bâle II, d’un troisième (les accords de Bâle III) en novembre 2010 en raison du déclenchement de la crise financière de 2007/2008.
D’autres comités et des associations indépendantes
D’autres comités ont pour objet l’analyse des questions relatives aux systèmes financiers, les normes concernant les infrastructures de paiement, de compensation et de règlement, l’organisation et le fonctionnement des banques centrales …
Les travaux de ces comités ont vocation à alimenter la réflexion internationale en matière de surveillance et de supervision.
Trois associations disposant, contrairement aux six comités, de leur propre gouvernance, complètent le processus de Bâle. Elles sont simplement hébergées dans les locaux de la BRI à Bâle. Il s’agit :
D’autres comités ont pour objet l’analyse des questions relatives aux systèmes financiers, les normes concernant les infrastructures de paiement, de compensation et de règlement, l’organisation et le fonctionnement des banques centrales …
Les travaux de ces comités ont vocation à alimenter la réflexion internationale en matière de surveillance et de supervision.
Trois associations disposant, contrairement aux six comités, de leur propre gouvernance, complètent le processus de Bâle. Elles sont simplement hébergées dans les locaux de la BRI à Bâle. Il s’agit :
- du Conseil de stabilité financière, qui élabore des documents d’orientation en vue de propager des bonnes pratiques en matière de régulation ;
- de l’association internationale de protection des dépôts ;
- de l’association internationale des contrôleurs d’assurance.
La BRI exerce aussi une activité d’analyse économique et financière
Le Département monétaire et économique de la BRI réalise des travaux de recherche et d’analyse sur des questions traitant de la stabilité monétaire et financière. Il fournit par ailleurs un appui aux comités hébergés par la BRI et organise des réunions entre hauts responsables de banque centrales ou d’institutions internationales chargés de veiller à la stabilité financière. De plus, il a en charge la collecte, l’analyse et la diffusion des statistiques sur le système financier international.La BRI fait office de banque des banques centrales
La BRI contribue aux activités des banques centrales en les aidant dans la gestion de leurs réserves et en favorisant la coopération internationale dans ce domaine. La BRI propose également ses services financiers aux organisations financières internationales.Au 31 mars 2015, le total des dépôts de la clientèle s’élevait à quelques 187 milliards de DTS, dont 95 % libellés en devises et 5 % en or.
La BRI dispose de moyens financiers et d’une organisation propres
Le capital de la BRI est composé d’actions appartenant à 60 banques centrales, les institutions et personnes privées en ayant été exclues depuis 2000. Ce capital est divisé en 600 000 actions dont la moitié appartient aux banques centrales d’Allemagne, d’Angleterre, de Belgique, de France, d’Italie et des États-Unis.Dotée d’un budget total de l’ordre de 297 millions de Francs Suisses en 2014/2015, et employant 623 personnes provenant de 57 pays, la BRI dispose d’une structure de gouvernance duale, avec un conseil d’administration qui détermine les grandes orientations stratégiques ou politiques, et un directeur général qui a en charge la gestion de l’institution.
Le Conseil d’administration
Le conseil d’administration est l’instance politique de la BRI dans laquelle sont prises les principales décisions. Composé au maximum de 21 membres, dont les gouverneurs des banques centrales de France, d’Allemagne, de Belgique, d’Italie du Royaume-Uni, des Etats-Unis, du Japon et de la Chine, il élit en son sein le président du Conseil d’administration pour un mandat de trois ans renouvelable une fois.C’est l’actuel président de la Bundesbank, l’Allemand Jens Weidmann qui occupe ces fonctions qui auparavant étaient exercées par Christian Noyer, lorsqu’il était gouverneur de la Banque de France. Son mandat court jusqu’en novembre 2018. L’Indien Raghuram Rajan le seconde en tant que Vice-président.
Une spécificité des statuts de la BRI fait que les gouverneurs des banques centrales de France, d’Allemagne, de Belgique, d’Italie, du Royaume-Uni et des Etats-Unis sont membres de droit du conseil d’administration et ont la possibilité de désigner un nouveau membre du conseil de même nationalité que la leur. C’est ce qui explique que la France compte deux membres au conseil d’administration de la BRI, tout comme les Etats-Unis, le Royaume-Uni, la Belgique ou l’Italie, mais pas le Japon ni la Chine. A noter également que le Président du conseil des gouverneurs de la BCE est également membre du conseil d’administration de la BRI.
Ce dernier se réunit au moins six fois par an et bénéficie de l’assistance de 4 comités chargés de le conseiller.
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